Imaginez entrer dans des toilettes publiques et découvrir qu’avant même de pouvoir tirer quelques feuilles de papier hygiénique, vous devez sortir votre smartphone, scanner un QR code et regarder une publicité. Cela ne ressemble-t-il pas à un roman d’anticipation ? Pourtant, c’est bien la réalité dans certaines villes chinoises où les distributeurs de papier hygiénique se transforment en supports publicitaires.
Des distributeurs de papier hygiénique pas comme les autres
On peut se demander où l’innovation s’arrêtera, tant certaines idées paraissent sorties tout droit d’une série télé. Dans certaines toilettes publiques chinoises, le papier hygiénique n’est plus accessible en libre-service. Pour en obtenir il faut désormais par un rituel technologique.
- L’utilisateur doit scanner un code QR avec son smartphone.
- Patientez une petite trentaine de secondes devant une publicité.
- Puis récupérer une quantité limitée de papier toilette.
Pour ceux qui n’ont pas la patience ou qui souhaitent éviter cette étape, une option payante existe. Il faudra alors verser 0,5 yuan, soit environ 7 centimes d’euro, pour accéder directement au papier sans publicité.
Une mesure présentée comme écologique
Pour justifier ce dispositif pour le moins surprenant, les autorités locales avancent un argument écologique. Selon elles, l’obligation de scanner un QR code et de patienter devant une publicité permettrait de limiter le gaspillage et le vol de papier hygiénique dans les lieux publics.
Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que la Chine tente d’apporter une réponse technologique à ce problème. En 2017, le parc du Temple du Ciel à Pékin avait déjà fait sensation avec des distributeurs de papier équipés de reconnaissance faciale.
Le système scannait le visage des utilisateurs pendant trois secondes avant de délivrer 60 centimètres de papier. Impossible cependant d’en obtenir davantage avant 9 minutes, délai imposé pour éviter les abus.
L’idée, spectaculaire sur le plan médiatique, avait été motivée par des images devenues virales où l’on voyait des personnes âgées repartir avec d’énormes quantités de papier. Ce comportement trouve ses racines dans l’histoire même de la Chine.
Une génération (1940-1950) a été marquée par les privations et la peur constante du manque. A cette époque accumuler et stocker représentait une forme de sécurité face à l’incertitude.
Entre innovation et intrusion dans la vie privée
Sur les réseaux sociaux, les avis sont loin d’être enthousiastes. Beaucoup parlent d’un système orwellien. Les critiques s’articulent autour de plusieurs points sensibles.
D’abord, l’accessibilité. Que se passe-t-il si le téléphone est déchargé, sans connexion internet ou si l’on n’a pas de monnaie ? Ces situations, bien réelles, peuvent vite tourner au casse-tête.
Ensuite, les questions d’hygiène. Manipuler son smartphone aux toilettes pour accéder au papier, soulève des inquiétudes sanitaires évidentes. Beaucoup estiment que cette pratique favorise la propagation de microbes, là où l’on devrait justement renforcer les règles de propreté.
Enfin, la protection de la vie privée. Chaque scan ou interaction via QR code peut potentiellement générer des données exploitables, qu’il s’agisse de profils publicitaires ou d’éléments liés à la surveillance.
De quoi alimenter un sentiment de méfiance face à une technologie perçue comme intrusive jusque dans les gestes les plus intimes du quotidien.
Perspectives d’avenir
Les autorités défendent ces dispositifs en les présentant comme des mesures écologiques nécessaires. L’idée est de responsabiliser les citoyens et de modifier les comportements.
Face à ces contraintes, certains chinois pourraient revenir à une ancienne méthode, à savoir apporter son propre papier toilette. Quoi qu’il en soit les toilettes dites intelligentes révèlent les limites de la technologie face aux besoins les plus élémentaires.
Le débat qu’elles suscitent dépasse largement la question du papier toilette. Il touche à un enjeu plus vaste, l’équilibre entre innovation, dignité et liberté individuelle.
Source: Wccftech